Cette minuscule main est celle de mon bébé, né à 32 semaines et des poussières.
Noël venait tout juste de passer, vous vous souvenez cette année même où l'on avait du annuler les festivités, dû à un virus répandu partout sur la planète ? Eh bien cette année là, c'était bien correct pour nous de rester en petit clan familial, car avec mon ventre bien rond, rempli de deux petites filles en développement, je n'avais pas énormément d'énergie. Deux bébés dans le ventre, qui grouillent sans arrêt, ça fait des nuits mouvementées et peu reposantes. J'avoue qu'à ce moment, rendue à 32 semaines, j'avais mal partout et j'avais vraiment hâte d'être libérée ce poids... Si j'avais su que ces pensées pouvaient se concrétiser, j'aurais volontier gardé cette idée hors de ma tête.
On était donc le jour après Noël, quand j'ai commencé à me sentir étrange, ça me brassait dans le ventre, mais pas comme d'habitude. J'ai honnêtement pensé à une indigestion mais malgré plusieurs aller-retours à la salle de bain, la douleur ne s'estompait pas. Je voudrais préciser qu'il s'agissait d'une 3e grossesse, alors je me pensais bien apte à savoir si j'avais des contractions ou non. D'ailleurs j'avais de fausses contractions tous les jours depuis environ la 20e semaine et cela n'y ressemblait pas non plus. J'ai décidé de demander conseil à mon amie infirmière, en essayant de me reposer sur le divan, espérant que mon indigestion passe. Elle me suggère un bain, qui finalement ne changea rien, puis elle me propose de calculer l'espacement de mes crampes. Je ne vois pas vraiment l'intérêt sur le coup, mais je décide d'utiliser une application pour calculer les contractions. Ah, en effet je semble avoir des crampes au 4-5 minutes, plutôt régulières. Bizarre.
On pense souvent à tort que toutes les grossesses de jumeaux sont plus à rique d'un accouchement prématuré, mais pour ma part, c'était une grossesse géméllaire de type didi, soit deux poche et deux placenta. Ceux-ci sont en réalité considérés à risque plutôt faible de prématurité. Mon amie me suggère tout de même de contacter la maternité et de m'y rendre pour vérifier.
Il est 21h en ce soir de décembre, à -27 degré dehors, lorsqu'on prend la route de l'hôpital en pensant revenir chez nous au courant de la nuit. On a pas réveillé nos 2 enfants qui dormaient pour dire aurevoir (erreur!). On les a confié à leur grand parents qui sont venus à la maison. Je ne le savais pas à ce moment, mais je reverrais mes enfants seulement 8 jours plus tard...
À l'hôpital, on refuse à mon conjoint d'entrer avec moi (merci Covid) sauf quand je serai admis, le cas échéant. Il devra donc attendre au froid dans la voiture, seul. De mon côté, seule dans un cubicule froid au triage de la maternité, sans une main pour me rassurer. Moniteur, examen, prise de sang - on me confirme, le travail est bien commencé. On me refuse toujours l'admission malgré cela, à 32 semaines, ils souhaitent me donner la médication pour cesser le travail en espérant gagner du temps. J'essaie de transmettre les infos par texto à mon conjoint, frigorifié et stressé, en attente dans le stationnement de l'hôpital. Après plus de 1h, je suis toujours seule dans mon cubicule, j'ai des contractions qui sont de plus en plus douloureuses, presque intolérables couchée en alternance sur le dos et sur le côté. Je m'indigne que mon conjoint ne puisse être à mes côtés, mais on me signale que la procédure est ferme, pas d'admission en chambre = pas d'accompagnant permis. Voyant que le travail ne peut être interrompu par la médication et que l'accouchement est imminent, on me fait l'injection pour la maturation rapide des poumons pour les bébés. (Cette piqure dans les fesses est TELLEMENT douloureuse, je me rapelle avoir dit à l'infirmière que je ne me souviendrais d'elle - Allo Charlie)
J'avais tellement de questionnements, tout se bousculait dans ma tête. Mes bébés, pourquoi étaient-ils si pressés ? Pourquoi ne pas rester au chaud, dans mon ventre? Ma connection avec eux ce soir là était bien mauvaise, avec le stress, l'environnement, l'insécurité, l'incompréhension, comment aurais-je pu être sereine ? J'étais pas prête, c'était trop tôt!
On m'a finalement donné l'accord de faire monter mon conjoint pour me rejoindre et je dois dire que la suite de l'accouchement s'est déroulé à toute vitesse, en catastrophe, je ne sais même pas à quel point j'ai eu conscience de ce qui se passait. C'est ainsi que j'ai accouché à 32 semaines, de 2 minuscules bébés de 3 lbs 12 onces et de 4 lbs 3 onces.
Heureusement pour nous, à part leur prématurité, nos bébés sont nés en bonne santé. Mais notre séjour à l'hôpital ne faisait que commencer.
Pour en savoir plus sur les premiers jours de vie de mes bébés prématurés et les semaines passées en néonatalogie, je vous invite à lire la suite. (à venir bientôt)